Vos contrats de droit privé face au COVID-19

30 mars 2020

Face à l’épidémie du Coronavirus, le gouvernement a mis en place diverses mesures de soutien aux entreprises, d’ordre fiscal, social, économique ou encore financier pour accompagner les entreprises. Dès le 28 février 2020, Monsieur le Ministre Bruno Le Maire précisait que le Coronavirus serait considéré comme un cas de force majeure pour les entreprises. Au-delà de l’effet d’annonce, peut-on envisager de suspendre ou de mettre fin à ses obligations contractuelles pour cause de Covid-19 ?

Assurément, la crise sanitaire qui nous frappe a d’importantes conséquences sur les contrats conclus avant son apparition que vous ne pouviez anticiper. Elle peut rendre compliquée voire impossible l’exécution de votre contrat et le respect de sa force obligatoire. Pourtant, pour éviter toute sanction, un contrat conclu doit être respecté et exécuté de bonne foi. Il est donc particulièrement risqué de prétexter de l’épidémie du Coronavirus pour ne pas – ou mal – respecter vos engagements. Cependant, la situation actuelle peut malheureusement vous y contraindre. Il faut alors procéder à une analyse précise des risques juridiques, économiques et sociaux potentiels avant d’agir de la sorte. Il faut ainsi tenir compte de la suite de vos relations avec votre contractant et de la pérennité de vos entreprises.

Toutefois, d’autres solutions s’offrent à vous.

Recherches de solutions amiables

Il est recommandé de négocier à l’amiable avec votre contractant pour aménager d’un commun accord les modalités d’exécution de votre contrat, notamment, délais de paiement, suspension des obligations, etc. Vous pouvez le faire seul ou saisir gratuitement le Médiateur des entreprises. Lorsque vos difficultés sont importantes et concernent de nombreux engagements, il est également possible demander en justice la rapide désignation confidentielle d’un mandataire ad hoc ou d’un conciliateur chargé de trouver des solutions pour vous aider avec vos créanciers. Ce tiers indépendant pourra conduire des renégociations au cas par cas. Il ne s’agira que de propositions et rien ne pourra être imposé aux différentes parties au contrat.

Recours à des solutions juridiques

Enfin, il est surtout possible de recourir au droit des contrats pour trouver une solution au cas par cas et notamment à la force majeure mise en avant par le Ministre de l’Economie et des Finances. Si la force majeure est établie, l’exécution de votre contrat pourra être suspendue si l’empêchement est temporaire ou, lorsque l’empêchement est définitif, le contrat résolu de plein droit sans indemnité. Cependant, la caractérisation d’un cas de force majeure ne sera pas systématique et nous vous proposons alors d’autres alternatives.

Quels sont les contrats visés ?

Tous les contrats ne sont pas soumis aux règles que nous présentons. Ainsi, une ordonnance a été adoptée (Ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020) pour les contrats soumis au Code de la commande publique et les contrats publics qui n’en relèvent pas. Pour certains contrats de droit privé, le gouvernement a également prévu des mesures spéciales : Ordonnance du 25 mars 2020 relative aux conditions financières de résolution de certains contrats de voyages touristiques et de séjours en cas de circonstances exceptionnelles et inévitables ou de force majeure. Enfin, l’ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période permet, quant à elle, de résoudre certaines questions[1]. En effet, les clauses contractuelles sanctionnant l’inexécution d’un débiteur sont paralysées entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.

Nos propos ne visent donc que les contrats de droit privé pour lesquels le législateur n’est pas expressément intervenu conclus à partir du 1er octobre 2016 (et donc soumis au « nouveau » droit des contrats du Code civil). Pour les contrats antérieurs à cette date, les observations présentées ci-dessous ne sont pas strictement applicables et une analyse différente est parfois préférable.

Le Coronavirus est-il un cas de force majeure ?

En matière contractuelle, la force majeure est définie à l’article 1218 du Code civil comme l’empêchement pour un débiteur d’exécuter son obligation en raison d’un événement qui échappe à son contrôle, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées. Les juges du fond apprécient souverainement le cas de force majeure à la date de survenance du fait et non à la date de conclusion du contrat. Il est en différemment lorsque les parties ont décidé conventionnellement d’écarter ou d’aménager les cas de force majeure.

Pour que la force majeure soit retenue, l’événement doit donc répondre à trois conditions cumulatives :

  • L’évènement doit être imprévisible au moment de la conclusion du contrat. Cette condition doit être entendue comme les faits qu’un homme avisé aurait pu raisonnablement prévoir ;
  • L’évènement doit être irrésistible dans son exécution. Le débiteur a été dans l’impossibilité d’exécuter son obligation. Une exécution de l’obligation plus complexe ou plus onéreuse n’entraînerait pas une irrésistibilité ;
  • L’évènement doit être extérieur au débiteur, c’est-à-dire indépendant de sa volonté et de ses agissements.

Face au COVID-19, la condition d’extériorité ne fait pas débat contrairement à celles d’imprévisibilité et d’irrésistibilité. Pour déterminer si le Coronavirus constitue un cas de force majeure, il convient de revenir sur des situations passées.

La grippe H1N1, le virus de la dengue ou du chikungunya n’ont pas été jugés comme des crises sanitaires constitutives d’événements de force majeure. Les juges ont considéré que les maladies étaient connues, de même que leurs risques de diffusion et effets sur la santé. En conséquence, une épidémie n’est donc pas nécessairement ni automatiquement un cas de force majeure.

Cependant, la situation pourrait être différente concernant le Coronavirus. En effet, le 30 janvier 2020, l’Organisation mondiale de la santé a déclaré que le COVID-19 constituait une urgence de santé publique de portée internationale, aujourd’hui qualifiée de pandémie. La crise sanitaire qui en résulte serait donc imprévisible, extérieure au débiteur et irrésistible.

La Cour d’Appel de Colmar s’est rangée à cet avis en jugeant, concernant l’absence à son audience d’une personne en rétention administrative ayant été contact avec du personnel susceptible d’être positif au COVID-19, que « ces circonstances exceptionnelles, […] revêtent le caractère de la force majeure, étant extérieures, imprévisibles et irrésistibles, vu le délai imposé pour statuer et le fait que, dans ce délai, il ne sera pas possible de s’assurer de l’absence de risque de contagion et de disposer d’une escorte autorisée à conduire M. G. à l’audience ». (Colmar, 6e ch., 12 mars 2020, n° 20/01098). La Cour d’Appel retient que le risque de contagion du COVID-19 constitue un cas de force majeure. La portée de cet arrêt reste à confirmer.

Néanmoins, en transposant la motivation de la Cour d’Appel de Colmar en matière contractuelle, le débiteur défaillant devra prouver qu’il n’a pu anticiper les obligations sanitaires et de confinement (au regard de la soudaineté des mesures, cette preuve pourrait être apportée) et qu’il n’a pu trouver d’autres solutions. Il devra également établir le lien de causalité entre son impossibilité d’exécuter l’obligation et la crise sanitaire en cours afin de suspendre ou d’obtenir la résolution de plein droit du contrat.

Les juges vont toutefois se montrer vigilants quant à la preuve de l’irrésistibilité dans l’exécution de l’obligation au regard de la nature de l’obligation afin d’éviter tout effet d’aubaine né de la crise sanitaire. En effet, par exemple, si l’obligation pouvait être exécutée par équivalence ou lorsque l’obligation est le paiement d’une somme d’argent, le débiteur ne pourra que difficilement se délier de son obligation.

Attention à la date de conclusion de votre contrat

Si la force majeure est susceptible d’être retenue dans certaines circonstances bien déterminées, la date de conclusion de votre contrat n’est pas sans conséquences.

La progressivité des informations diffusées doit en effet être prise en compte. La chronologie suivante mérite d’être relevée :

  • le 30 janvier 2020, la reconnaissance par l’OMS d’une épidémie internationale,
  • le 28 février 2020, l’intervention du Ministère de l’Economie et des Finances pour déclarer la force majeure applicable à l’ensemble des contrats publics, ou encore les différents arrêtés qui interdisent les rassemblements de plus de 1000, puis 100, puis 2 personnes.
  • Le 16 mars 2020[2], Décret limitant les déplacements.

Il convient donc de se placer à la date de formation du contrat pour vérifier si votre contrat est soumis à un cas de force majeure. Cette même date de conclusion du contrat est également importante pour vérifier si les conditions de l’imprévision au sens de l’article 1195 du Code civil abordé plus bas peuvent être réunies.

L’un des critères déterminants de la force majeure demeure l’imprévisibilité. En d’autres termes, il faut prouver qu’il était impossible d’anticiper cet évènement car, au moment de la signature, la situation rencontrée ne pouvait être appréhendée. Elle n’était ni connue ni potentielle. Ainsi, une attention toute particulière doit être portée à la date de conclusion du contrat : si vous avez conclu votre contrat pendant la période de restrictions liée au COVID-19 imposées par le gouvernement, il sera difficile a posteriori d’invoquer l’imprévisibilité de l’épidémie de Coronavirus et de ses effets pour vous soustraire à vos obligations. Cette seule circonstance exclurait la qualification de force majeure quand bien même elle rendrait impossible, dans quelques jours, l’exécution de votre contrat. Il en ira de même si le contrat a été renouvelé après l’apparition de l’épidémie de Coronavirus.

En toute hypothèse, il convient d’être très prudent, notamment aussi concernant la date d’invocabilité de la force majeure. Elle ne saurait être faite trop en amont, lorsque les conditions d’exécution sont encore remplies. Par exemple, un entrepreneur ne pourrait invoquer la force majeure le 16 mars 2020 pour justifier son refus d’intervenir chez son client. Le décret réglementant les déplacements n’est en effet applicable qu’à compter du mardi 17 janvier 2020 à 12 heures. Il n’appartient en effet pas au cocontractant débiteur d’une obligation d’anticiper les décisions et les conséquences de celle-ci.

Si toutes les conditions de la force majeure sont réunies, quels sont alors ses effets ?

Les effets de la force majeure sur votre contrat

Chaque situation et chaque contrat étant différent, il est nécessaire de procéder à une analyse au cas par cas. Les effets de la force majeure ne sont en effet pas toujours identiques.

A titre liminaire, la force majeure ne peut être invoquée que par le débiteur de l’obligation, et non par le créancier. Ce principe semble avoir été discuté en jurisprudence puisqu’un arrêt est venu consacrer la possibilité pour un créancier de se prévaloir de la force majeure. Cette solution reste cependant isolée. Toutefois, le contexte actuel très particulier pourrait/devrait autoriser des appréciations judiciaires souples.

En vertu de l’article 1218 du code civil « si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1 ».

L’effet le plus classique de la force majeure – celui qui devrait se rencontrer le plus en période de COVID-19 – est donc la suspension du contrat et plus particulièrement des obligations du contrat. Qui dit suspension dit alors report des obligations : elles continuent d’exister et sont seulement retardées dans leur exécution. Cette exécution interviendra dès que possible, dès la fin de l’état d’urgence sanitaire décrété par l’Etat français. Durant ce laps de temps, le débiteur est ainsi libéré des éventuelles pénalités pour retard dans l’exécution de sa prestation qui peuvent être prévues par le contrat. De même, la partie au contrat créancière peut suspendre ses paiements sans pouvoir exiger de réparation pour le préjudice que lui cause cette suspension.

Si la suspension des obligations est impossible ou inutile, c’est cette fois un empêchement définitif qui est visé. C’est par exemple le cas à la suite du décès du débiteur, de la destruction des marchandises ou face à la nature du contrat dont l’exécution ne pourrait être reportée dans le temps. Il devient alors possible d’invoquer la résolution du contrat qui vous lie avec votre cocontractant afin de vous libérer de vos obligations contractuelles. Aucune indemnité ne sera due par le débiteur empêché pour le préjudice qui résulterait pour son cocontractant et les tiers de l’inexécution et de la résolution du contrat.

Ici, l’obligation est éteinte dans les conditions prévues par les articles 1351[3] et 1351-1 du Code civil[4]. Dans un but d’efficacité et de rapidité, il conviendra de privilégier la résolution d’un commun accord des parties afin d’éviter la lenteur d’une intervention judiciaire ou un contentieux. Si des arrhes ont été versés ou si un dépôt de garantie a été payé ces derniers devront également être restitués.

Quid de l’exécution partielle du contrat ? Comment envisager les choses si une partie seulement des obligations a été exécutée lorsque cela était encore possible ?

La réponse dépendra là encore de votre situation. En effet, l’article 1229 du code civil, en son alinéa 3 dispose que : « Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l’exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l’intégralité de ce qu’elles se sont procuré l’une à l’autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation ».

Par exemple, si un débiteur a procédé au paiement sans contrepartie ce dernier devra lui être restitué. Si une exécution fractionnée était prévue, le débiteur sera libéré de ses obligations de manière proportionnée pour la partie restante et dont l’exécution est devenue impossible.

Cette solution devra donc être appréciée au cas par cas, en fonction de la nature de la ou des obligations qui doivent être exécutées. Nous percevons déjà les prémices de bon nombre de contentieux, les intérêts des cocontractants pouvant difficilement s’aligner dans toutes les situations.

Nous le constatons, une réponse unique ne peut être apportée pour traiter de manière uniforme l’ensemble des relations contractuelles. Chaque situation doit être analysée au cas par cas, ce qui laisse une place fondamentale au contenu du contrat et aux aménagements des parties.

Attention au contenu de votre contrat

Il est donc nécessaire de connaître le contenu de votre contrat pour vous prémunir de tout manquement ou pour être en mesure de réagir face aux difficultés rencontrées avec votre cocontractant. En effet, en vertu de la liberté contractuelle, certains aménagements peuvent avoir été convenus. Ils sont susceptibles de contrecarrer les développements précédents.

Certaines clauses doivent ainsi être regardées avec vigilance :

  • Clause obligations des parties : Quelles obligations dois-je remplir au titre du contrat ?
  • Clause pénale : Suis-je contraint à des pénalités en cas d’inexécution ou retard de paiement ou de livraison ?
  • Clause d’imprévision : renonciation ou non à l’imprévision ?
  • Clause de révision du contrat ?
  • Clauses contractuelles sanctionnant l’inexécution d’un débiteur : en vertu de l’article 4 de l’Ordonnance n° 306 du 25 mars 2020, elles sont paralysées entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire. V. notre article « Des mesures d’accompagnement économique, financier et fiscal pour votre entreprise face au Covid-19 ». LIEN VERS L’ARTICLE
  • Clause de force majeure : quelle définition est retenue ? quelles modalités pour mettre en œuvre la clause ?

Les parties peuvent ainsi convenir d’écarter totalement la force majeure. Elles peuvent également décider de définir les événements qu’elles considèrent comme constitutifs de force majeure, permettant ainsi soit d’en alléger les conditions, soit au contraire de les renforcer afin de limiter sa mise en œuvre. La seule survenance de l’événement visé dans la clause constitue alors la force majeure, sans qu’il y ait lieu de rechercher si le fait répond aux critères légaux de la force majeure[5]. Cette clause permet d’adapter les cas de force majeure à la situation particulière des parties et de stabiliser conventionnellement l’effet exonératoire et libératoire de la force majeure afin de remédier aux incertitudes qui affectent sa mise en œuvre.

Il convient donc de se reporter scrupuleusement aux termes du contrat pour apprécier l’existence d’un cas de force majeure. En sus du contrat, il est nécessaire également de se reporter aux conditions générales de vente (CGV) de son fournisseur et conditions générales d’achat (CGA) de son client, pour connaître des autres stipulations susceptibles de s’appliquer.

Dès lors, face à la nature de certains contrats et dans certaines situations, une alternative existe pour parvenir à une adaptation de vos obligations contractuelles au contexte du COVID-19.

L’alternative : la révision du contrat pour imprévision

Une excellente alternative au recours à la force majeure consiste en la renégociation du contrat pour imprévision. Pour ce faire, il faut que cette possibilité n’ait pas été écartée contractuellement. En effet, La clause de renonciation à l’application de l’article 1195 du Code civil, qui autorise cette révision, est presque devenue une clause de style dans les contrats d’affaires.

L’imprévision désigne les situations où un contrat, le plus souvent dont l’exécution est échelonnée dans le temps, subit un profond déséquilibre à la suite d’un changement imprévisible des circonstances ayant présidé à sa conclusion, ce qui rend son exécution beaucoup plus onéreuse. Elle entraîne un déséquilibre qui s’apprécie au moment de l’exécution du contrat entre les différentes prestations contractuelles.

Le « changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat » peut être caractérisé par les conséquences brutales et subies de la crise sanitaire inhérente au COVID-19 ; sous réserve de la date de conclusion du contrat comme exposée précédemment en matière de force majeure. Ce changement doit rendre l’exécution, non pas impossible comme en matière de force majeure, mais excessivement onéreuse, ce qui n’a pas été défini par le législateur. Il doit s’agir d’un déséquilibre majeur, c’est-à-dire d’une exécution entraînant des charges exorbitantes pour l’un des contractants.

Si ces conditions sont réunies, une partie peut demander une renégociation amiable à son cocontractant sans toutefois cesser d’exécuter son contrat. En cas de refus ou d’échec de la renégociation, si les parties ne s’entendent pas pour résoudre le contrat ou demander son adaptation au juge d’un commun accord, le débiteur victime du changement de circonstances pourra saisir le juge de sa demande de révision ou de résiliation en apportant la preuve de la réunion des conditions de l’article 1195. Il faut cependant espérer une prise en compte des intérêts mutuels des parties et de la situation de crise sanitaire pour espérer un accord amiable des parties. En effet le temps d’attente de l’obtention d’une décision judiciaire risque d’être souvent inadapté aux circonstances et aux intérêts économiques des parties.

Enfin une dernière alternative, plus incertaine, pourrait résider en la caducité du contrat.

Une solution incertaine : la caducité du contrat

L’article 1186 du Code civil énonce qu’« un contrat valablement formé devient caduc si l’un de ses éléments essentiels disparaît ». Les « éléments essentiels » d’un contrat ne font pas l’objet d’une définition législative. Aussi un contrat ne correspondant plus aux attentes des parties, notamment à cause de la crise sanitaire, pourrait être considéré comme caduque s’il n’est plus réalisable dans les conditions définies par les parties. Il ne serait plus ici nécessaire d’établir l’impossibilité d’exécuter le contrat comme en matière de force majeure, ni une exécution excessivement onéreuse comme en matière de révision pour imprévision. Le recours à ce fondement apparaît néanmoins plus incertain et inadapté à de nombreux contrats. Toutefois, dans certaines situations, ce pourrait être un palliatif permettant de mettre fin à un contrat du fait de la crise sanitaire.

[1] Voir notre article : « Des mesures d’accompagnement économique, financier et fiscal pour votre entreprise face au Covid-19 ».

[2] Décret n° 2020-260 du 16 mars 2020 portant réglementation des déplacements dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus covid-19, abrogé puis remplacé par le Décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire modifié par le Décret n° 2020-337 du 26 mars 2020.

[3] L’impossibilité d’exécuter la prestation libère le débiteur à due concurrence lorsqu’elle procède d’un cas de force majeure et qu’elle est définitive, à moins qu’il n’ait convenu de s’en charger ou qu’il ait été préalablement mis en demeure.

[4] Lorsque l’impossibilité d’exécuter résulte de la perte de la chose due, le débiteur mis en demeure est néanmoins libéré s’il prouve que la perte se serait pareillement produite si l’obligation avait été exécutée. Il est cependant tenu de céder à son créancier les droits et actions attachés à la chose.

[5] CA Versailles 12-12-1996 : RJDA 7/97 n° 906.