Covid-19 : Actualités de la semaine du 13 au 19 avril 2020

Décret n° 2021-255 du 9 mars 2021

20 avril 2020

En réponse à l’épidémie du Coronavirus, le Gouvernement a annoncé diverses mesures de soutien aux entreprises, d’ordre fiscal mais également économique et financier pour accompagner les entreprises. Face à l’abondance des mesures adoptées, vous retrouverez ici la présentation des nouveautés de la semaine du 13 au 19 avril.

Vous pouvez retrouver l’ensemble des mesures adoptées depuis le début de la crise sanitaire en consultant notre inventaire complet.

Vous pourrez découvrir ci-après :

  • Le Communiqué ministériel du 17 avril sur le report des échéances fiscales du mois de mai pour les entreprises
  • Les nouvelles règles sensiblement modifiées applicables au fonds de solidarité (Décret du 16 avril 2020)
  • Les adaptation des relations contractuelles issues de l’Ordonnance du 15 avril 2020
  • L’adaptation des délais légaux et des mesures administratives et juridictionnelles
  • Nos dernières précisions sur les distributions de dividendes.

Nous profitons de ces lignes pour vous signaler la publication du Décret n° 2020-418 du 10 avril 2020 portant adaptation des règles de réunion et de délibération des assemblées et organes dirigeants des personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé en raison de l’épidémie de covid-19.

S’agissant uniquement de précisions très techniques portant sur l’application de l’Ordonnance du 25 mars 2020, nous n’avons pas jugé nécessaire d’en réaliser ici un commentaire.

  1. Mesures fiscales

Consulter le communiqué de presse du Ministère de l’Action et des Comptes publics sur le report des échéances fiscales des entreprises du mois de mai.

Par un communiqué du 17 avril 2020, le Ministre de l’Action et des Comptes publics a annoncé que toutes les échéances de dépôt des liasses fiscales et autres déclarations assimilées du mois de mai sont reportées au 30 juin 2020.

Cette mesure s’applique :

  • au relevé de solde d’impôt sur les sociétés 2019 (état 2572) ;
  • aux liasses fiscales 2019 : entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés (liasse 2065), associations (liasse 2070), SCI (liasses 2071 et 2072), ainsi qu’aux entreprises non soumises à l’impôt sur les sociétés: revenus déclarés en BIC, BNC, BA, professionnels ou non ;
  • à la mise à jour du périmètre d’intégration fiscale ;
  • à la CVAE (déclarations 1329 et 1330): attention, le communiqué précise que la date du 5/05 demeure un délai de rigueur pour le dépôts de la déclaration 1329-DEF des entités créditrices ;
  • à la DAS 2.

A la date de dernière relecture de la présente note d’actualité (le 19/04), aucune précision n’a à ce stade été donnée sur un éventuel report complémentaire pour la souscription des déclarations d’impôt sur le revenu des personnes physiques, dont le délai demeure pour le moment fixé au plus tard entre le 4 et le 11 juin prochain (i.e. date limite de déclaration en ligne selon les départements).

Or, le report des échéances concernant notamment les indépendants pour la détermination de leur résultat professionnel et les sociétés civiles pour la détermination des revenus fonciers procurés dans le cadre des SCI, tel que décrit, ci-dessus est clairement incompatible avec les échéances de l’impôt sur le revenu.

Un alignement des délais de l’impôt sur le revenu parait donc nécessaire et une communication supplémentaire du Gouvernement sur le sujet serait donc la bienvenue.

  1. Le fonds de solidarité désormais étendu

Consulter l’Ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 portant création d’un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation

Consulter le Décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation.

Décret lui-même modifié par un autre en date du 2 avril 2020

puis par un autre du 16 avril 2020.

Ce fonds de solidarité est majoritairement financé par l’Etat et les régions, mais aussi par les assureurs à un degré moindre. Il est institué pour une durée de trois mois (mars, avril et mai), prolongeable par décret pour une durée d’au plus trois mois. Il a pour objet le versement d’aides financières aux personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du COVID-19 et des mesures prises pour en limiter la propagation. Ces aides prennent la forme de subventions attribuées par décision du Ministre de l’action et des comptes publics.

Fiscalement, le PLFR II prévoit que les aides versées par le fonds de solidarité pourraient être exonérées.

L’article 1er du projet de la 2e loi de finances rectificative pour 2020 prévoit que « les aides versées par le fonds de solidarité institué par l’ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 sont exonérées d’impôt sur les sociétés, d’impôt sur le revenu et de toutes les contributions et cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle ». De même, « il est fait abstraction du montant de ces aides pour l’appréciation des limites prévues aux articles 50-0, 69, 102 ter, 151 septies et 302 septies A bis du Code général des impôts ». Cette disposition, qui exonère ces subventions de tout impôt sur les bénéfices et des cotisations sociales associées, permettrait ainsi de neutraliser les effets du versement de ces aides pour l’application du régime d’imposition applicable aux entreprises bénéficiaires pour lui donner une pleine efficacité.

Cependant, s’agissant d’une aide relevant du Règlement Général d’Exemption par Catégorie (Réglementation communautaire relative aux aides dites De Minimis), le projet de loi prévoit que cette exonération n’entrerait en vigueur que selon une date fixée par voie de Décret pris au plus tard 15 jours après la date de réception par le Gouvernement de la décision de la Commission européenne permettant de les considérer comme conformes au droit de l’Union européenne en matière d’aides d’État.

Cela signifie tout simplement que l’effectivité de cette mesure d’exonération est pour le moment suspendue à la décision de conformité que devra rendre la Commission Européenne, condition sine qua none de l’exonération.

Qui peut bénéficier de cette aide financière?

Peuvent bénéficier de ce fonds, les entreprises résidentes fiscales françaises demanderesses :

  • qui emploient de 0 à 10 salariés.
  • quel que soit leur statut juridique (entreprise individuelle, y compris micro-entrepreneur, et sociétés).
  • qui ont débuté leur activité avant le 1er février 2020.
  • qui ne se trouvaient pas en liquidation judiciaire au 1er mars 2020. Aussi, depuis le Décret du 16 avril, une entreprise en redressement judiciaire entre dans le champ d’application du fonds de solidarité.
  • ont un chiffre d’affaires hors taxe en 2019 inférieur à 1 M€ ; pour les entreprises n’ayant pas encore clos d’exercice, le chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l’entreprise et le 29 février 2020 doit être inférieur à 83 333 euros.

Il est enfin nécessaire que l’entreprise subisse les conséquences de la crise sanitaire pour avoir droit à cette aide. En application du Décret du 16 avril 2020, il convient désormais de distinguer la période d’avril de celle de mars 2020. Une aide propre à chacune de ces périodes peut être accordée.

  • Pour Mars 2020

Pour commencer, il faut que l’entreprise respecte l’une des deux conditions suivantes :

  • qu’elle ait fait l’objet d’une interdiction d’accueil du public intervenue entre le 1er mars 2020 et le 31 mars 2020
  • ou qu’elle ait subi une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % durant la période comprise entre le 1er mars 2020 et le 31 mars 2020 par rapport à la même période l’année précédente.

En quoi consiste l’aide ?

A compter du 31 mars 2020, les entreprises éligibles peuvent demander à recevoir une aide défiscalisée[1] de 1 500 euros quand elles ont subi une perte de chiffre d’affaires supérieure ou égale à 1 500 euros.

Si la perte est moindre, le montant attribué correspond alors au montant réel de perte constatée. Cette perte de chiffre d’affaires est définie comme la différence entre le chiffre d’affaires durant la période comprise entre le 1er mars 2020 et le 31 mars 2020, et le chiffre d’affaires pendant la même période l’année précédente[2]. Pour les entreprises créées après le 1er mars 2019, la perte est appréciée par rapport au chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l’entreprise et le 29 février 2020.

Pour les personnes physiques ayant bénéficié d’un congé pour maladie, accident du travail ou maternité durant la période comprise entre le 1er mars 2019 et le 31 mars 2019, ou pour les personnes morales dont le dirigeant a bénéficié d’un tel congé pendant cette période, cette perte est appréciée par rapport au chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre le 1er avril 2019 et le 29 février 2020.

Comment en bénéficier ?

Sur le site impots.gouv.fr, les entrepreneurs doivent se connecter à leur espace particulier (et non leur espace professionnel habituel) où ils trouveront dans leur messagerie sécurisée sous « Ecrire » le motif de contact « Je demande l’aide aux entreprises fragilisées par l’épidémie Covid-19 ». La demande doit être adressée au plus tard le 30 avril 2020. Le Décret du 16 avril a apporté une nouveauté : cette demande peut être formulée jusqu’au 15 mai 2020 pour les artistes auteurs, les associés des groupements agricoles d’exploitation en commun et les entreprises situées à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.

La demande doit être accompagnée du RIB de l’entreprise, d’une estimation de la baisse de chiffre d’affaires, d’une déclaration certifiant que l’entreprise remplit les critères d’application de l’aide, que les informations déclarées sont exactes et qu’il n’y a pas de dette fiscale ou sociale impayée au 31 décembre 2019, à l’exception de celles bénéficiant d’un plan de règlement. Le Décret du 16 avril impose désormais aussi d’ajouter une déclaration indiquant si l’entreprise était en difficulté au 31 décembre 2019 au sens de l’article 2 du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.

  • Pour Avril 2020

Pour commencer, il faut que l’entreprise respecte l’une des deux conditions suivantes :

  • qu’elle fasse l’objet d’une interdiction d’accueil du public intervenue entre le 1er avril 2020 et le 30 avril 2020.
  • ou qu’elle subisse une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % durant la période comprise entre le 1er avril 2020 et le 30 avril 2020 par rapport à la même période l’année précédente ou, si elle le souhaite, par rapport au chiffre d’affaires mensuel moyen de l’année 2019. Pour les entreprises créées après le 1er avril 2019, la perte est appréciée par rapport au chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l’entreprise et le 29 février 2020.

En quoi consiste l’aide ?

A compter du 30 avril 2020, les entreprises entrant dans son champ d’application peuvent demander à recevoir une aide défiscalisée de 1500 euros quand elles ont subi une perte de chiffre d’affaires supérieure ou égale à 1 500 euros. Si la perte est moindre, le montant attribué correspond alors au montant réel de perte constatée. Cette perte de chiffre d’affaires est définie comme la différence entre le chiffre d’affaires durant la période comprise entre le 1er avril 2020 et le 30 avril 2020, et le chiffre d’affaires pendant la même période l’année précédente ou, si l’entreprise le souhaite, le chiffre d’affaires mensuel moyen de l’année 2019. Pour les entreprises créées après le 1er avril 2019, c’est le chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l’entreprise et le 29 février 2020 qui est retenu.

Comment en bénéficier ?

Sur le site impots.gouv.fr, les entrepreneurs devront se connecter à leur espace particulier (et non leur espace professionnel habituel) où ils trouveront dans leur messagerie sécurisée sous « Ecrire » le motif de contact « Je demande l’aide aux entreprises fragilisées par l’épidémie Covid-19 ». La demande doit être adressée au plus tard le 31 mai 2020. Elle est accompagnée des mêmes pièces justificatives que celle de mars 2020.

Des conditions spécifiques à respecter, que l’octroi de l’aide soit demandé au titre du mois de Mars ou au titre du mois d’Avril  :

  • Le bénéfice imposable de l’entreprise, augmenté le cas échéant des sommes versées aux dirigeants associés au titre de l’activité exercée, n’excède pas, au titre du dernier exercice clos, pour les entreprises en nom propre, 60 000 euros. Ce montant est doublé si le conjoint du chef d’entreprise exerce une activité professionnelle régulière dans l’entreprise sous le statut de conjoint collaborateur. Lorsque l’entreprise est une société, le seuil est de 60 000 euros par associé et conjoint collaborateur. Enfin, pour les entreprises n’ayant pas encore clos un exercice, le bénéfice imposable augmenté le cas échéant des sommes versées aux dirigeants associés est établi à la date du 29 février 2020 sur leur durée d’exploitation puis ramené sur douze mois.
  • Les indépendants concernés (ou les dirigeants majoritaires des personnes morales), ne disposent pas, au 1er mars 2020, d’un contrat de travail à temps complet ou d’une pension de vieillesse et n’ont pas non plus bénéficié d’indemnités journalières de sécurité sociale supérieures à 800 euros en mars ou avril 2020 (selon le mois de référence de la demande d’octroi de l’aide).
  • Pour les sociétés commerciales « contrôlées», le bénéfice de l’aide n’est pas possible. Elle peut en revanche être accordée à la société contrôlante sous réserve que l’agrégation des données de salariés, chiffres d’affaires et bénéfices au niveau du groupe respecte les seuils présentés.

Une aide supplémentaire sous conditions

Une aide complémentaire d’un montant forfaitaire de 2 000 euros à 5000 euros peut également être demandée au cas par cas auprès du conseil régional du domicile des entreprises éligibles via une plateforme dédiée. L’attribution de cette aide n’est pas automatique et fait l’objet d’une instruction.

Plusieurs conditions sont à respecter par l’entreprise demanderesse :

  • Elle doit avoir bénéficié de l’aide du fonds de solidarité national pour la période de mars ou celle d’avril;
  • Elle doit employer un salarié au moins (en CDI ou CDD) au 1er mars 2020;
  • Le solde entre, d’une part, son actif disponible et, d’autre part, ses dettes exigibles dans les trente jours et le montant de ses charges fixes, y compris les loyers commerciaux ou professionnels, dues au titre des mois de mars et avril 2020 doit être négatif;
  • Elle doit justifier d’un refus de prêt de trésorerie par sa banque depuis le 1er mars 2020.

Le montant de l’aide supplémentaire est de :

  • 2 000 euros pour les entreprises ayant un chiffre d’affaires constaté lors du dernier exercice clos inférieur à 200 000 euros, pour les entreprises n’ayant pas encore clos un exercice et pour les entreprises ayant un chiffre d’affaires constaté lors du dernier exercice clos supérieur ou égal à 200 000 euros et pour lesquelles le solde entre l’actif disponible et le passif exigible à 30 jours à compter de la demande est inférieur, en valeur absolue, à 2 000 euros.
  • au montant de la valeur absolue du solde entre l’actif disponible et le passif exigible à 30 jours à compter de la demande, dans la limite de 3 500 euros, pour les entreprises ayant un chiffre d’affaires constaté lors du dernier exercice clos égal ou supérieur à 200 000 euros et inférieur à 600 000 euros.
  • au montant de la valeur absolue du solde entre l’actif disponible et le passif exigible à 30 jours à compter de la demande dans la limite de 5 000 euros, pour les entreprises ayant un chiffre d’affaires constaté lors du dernier exercice clos égal ou supérieur à 600 000 euros.

III. Les adaptation des relations contractuelles issues de l’Ordonnance du 15 avril 2020

Consulter l’Ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période.

Ce texte a pour objectif d’adapter l’appréhension des délais et mesures échus ou à échoir entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire (Voir point suivant IV). Il vise aussi le droit privé des contrats.

En la matière, le principe demeure le respect des obligations du contrat, ce sont simplement certaines inexécutions qui ne sont pas sanctionnées car trop tardives. Certaines de ces règles dérogatoires viennent d’être modifiées et complétées par une nouvelle ordonnance publiée au Journal officiel le 16 avril 2020.

Consulter l’Ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020 portant diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l’épidémie de covid-19

Par principe, l’application des clauses sanctionnant l’inexécution d’un débiteur est paralysée entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire (appelée ci-après « période protégée »).

Dès lors, les astreintes, les clauses pénales, les clauses résolutoires ainsi que les clauses de déchéance, lorsqu’elles ont pour objet de sanctionner l’inexécution d’une obligation dans un délai déterminé, sont réputées n’avoir pas pris cours ou produit effet, si ce délai a expiré lors de la période protégée. Elles prendront seulement effet un mois après cette période, si le débiteur n’a toujours pas exécuté son obligation d’ici là. Cependant, l’ordonnance du 15 avril a rectifié cette règle. Le report n’est dorénavant plus forfaitairement fixé à un mois à compter du 24 juin 2020, c’est la situation réelle qui prévaut. Le report correspond alors au temps écoulé entre d’une part, le 12 mars ou la date de naissance de l’obligation si elle est plus tardive, et d’autre part, la date à laquelle l’obligation aurait dû être exécutée. Cette modification permet d’appréhender de manière plus précise les situations impactées par la crise sanitaire, en tenant compte de l’impact qu’auront eu les mesures prises par les autorités pour lutter contre l’épidémie de Covid-19 sur l’exécution des contrats.

Exemple tiré du Rapport au Président de la République : « si une échéance était attendue le 20 mars 2020, c’est-à-dire huit jours après le début de la période juridiquement protégée, la clause pénale sanctionnant le non-respect de cette échéance ne produira son effet, si l’obligation n’est toujours pas exécutée, que huit jours après la fin de la période juridiquement protégée ».

Par ailleurs, l’Ordonnance du 15 avril a ajouté une nouvelle précision : « La date à laquelle ces astreintes prennent cours et ces clauses prennent effet, lorsqu’elles ont pour objet de sanctionner l’inexécution d’une obligation, autre que de sommes d’argent, dans un délai déterminé expirant après la période définie au I de l’article 1er, est reportée d’une durée égale au temps écoulé entre, d’une part, le 12 mars 2020 ou, si elle est plus tardive, la date à laquelle l’obligation est née et, d’autre part, la fin de cette période ». Cette possibilité ne vise que les obligations de faire hors paiement d’une somme d’argent (pour cette dernière hypothèse, le Rapport au Président de la république indique que les difficultés des débiteurs ont vocation à être prises en compte par les délais de grâce, les procédures collectives ou les procédures de surendettement).

L’objectif de cette mesure est d’aider les débiteurs malmenés par la crise sanitaire après la fin de la période protégée. Comment ?

  • Si l’obligation de faire est née avant le 12 mars, la durée du report des effets des astreintes ou des clauses visées correspond au temps écoulé entre le 12 mars et le 24 juin 2020.
  • Si l’obligation est née pendant la période protégée, le report des effets des astreintes ou des clauses visées correspond au temps écoulé entre la naissance de l’obligation postérieure au 12 mars et le 24 juin 2020.

Exemple : si un contrat de travaux antérieur au 12 mars 2020 prévoit la livraison du bâtiment à une date qui échoit le 10 juillet 2020, donc après la fin de la période juridiquement protégée, la clause pénale sanctionnant l’éventuelle inexécution de cette obligation ne prendra effet qu’à une date reportée d’une durée égale à la durée de la période juridiquement protégée (du 12 mars au 24 juin donc 3 mois et 12j). La clause pénale ne prendrait donc effet que le 23 octobre 2020.

De plus, le cours des astreintes et l’application des clauses pénales qui ont pris effet avant le 12 mars 2020 sont également suspendus pendant la période protégée. Ils reprendront effet dès le lendemain de cette dite période protégée.

Enfin, la partie à un contrat qui ne pourrait pas le résilier ou s’opposer à son renouvellement dans le délai fixé contractuellement en raison de la crise sanitaire, bénéficie d’un délai supplémentaire pour le faire. L’Ordonnance instaure ainsi une prolongation de deux mois – qui débutera à l’expiration de la période protégée – pour résilier ou dénoncer une convention lorsque sa résiliation ou l’opposition à son renouvellement devait avoir lieu dans une période ou un délai expirant lors de la période protégée par le texte.

Différentes illustrations sont consultables aux pages 9 et 10 d’une circulaire ministérielle du 26 mars 2020.

En dehors des hypothèses spéciales que nous venons d’évoquer, pour connaître le sort de votre contrat de droit privé face à la crise sanitaire, nous vous renvoyons à la notice que nous avons spécialement consacrée à la question. Vous serez ainsi en mesure de vérifier si vous pouvez invoquer un cas de force majeure ou obtenir la révision de votre contrat.

  1. L’adaptation des délais légaux et des mesures administratives et juridictionnelles

L’Ordonnance n°2020-306 évoquée précédemment en matière contractuelle vise également les délais légaux et les mesures administratives et juridictionnelles qui sont parfois repoussés.

Ainsi, des mesures ont été prises pour les délais non contractuels qui sont arrivés à échéance ou les actes qui devaient être accomplis pendant la période protégée (période d’état d’urgence sanitaire débutant au 12 mars + 1 mois). Il en est de même de tout paiement prescrit par la loi ou le règlement en vue de l’acquisition ou de la conservation d’un droit.

En revanche en sont exclus :

  • les paiements prévus par un contrat qui doivent quant à eux bien être respectés;
  • les délais dont le terme est fixé au-delà du mois suivant l’expiration de la cessation de l’état d’urgence sanitaire (à ce jour 24 juin 2020) ne font l’objet d’aucun report;
  • Les délais expirés avant le 12 mars 2020;
  • Depuis l’Ordonnance du 15 avril, pour ne pas paralyser les transactions, le report ne s’applique pas non plus aux délais de réflexion, de rétractation ou de renonciation prévus par la loi ou le règlement, ni aux délais prévus pour le remboursement de sommes d’argent en cas d’exercice de ces droits. Sont par exemple concernés les délais légaux en droit de la consommation, dans les contrats d’assurance, dans les contrats de service financier ou encore les contrats immobiliers. Cette précision a, selon le Rapport au Président de la République, un caractère interprétatif. Elle est donc rétroactive, ce qui crée un risque certain de contentieux.
  • Les matières exclues expressément du champ d’application de l’Ordonnance à son article 1er.

Dès lors, sauf disposition spéciale comme pour les approbations de comptes, l’ordonnance prévoit un aménagement pour que ne soit pas considéré comme fautif toute une série d’actes. Ainsi, tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d’office, application d’un régime particulier, non avenu ou déchéance d’un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période protégée sera réputé avoir été fait à temps s’il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois. Selon le Rapport au Président de la République, cela ne constitue ni une suspension, ni une prorogation du délai initialement imparti pour agir. « Il s’agit de permettre d’accomplir a posteriori (et comme si le délai avait été respecté) ce qu’il a été impossible de faire pendant la période d’urgence sanitaire augmentée un mois ». C’est finalement un report optionnel.

En outre, l’ordonnance proroge de plein droit, jusqu’à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la fin de la période protégée, les mesures suivantes dont le terme arrive à échéance pendant cette période :

– les mesures conservatoires, d’enquête, d’instruction, de conciliation ou de médiation ;

– les mesures d’interdiction ou de suspension qui n’ont pas été prononcées à titre de sanction ;

– les autorisations, permis et agréments ;

– les mesures d’aide, d’accompagnement ou de soutien aux personnes en difficulté sociale ;

– les mesures judiciaires d’aide à la gestion du budget familial.

Toutefois, l’Ordonnance du 15 avril est venue renforcer les pouvoirs des juges et des autorités compétentes qui peuvent modifier ces mesures, y mettre fin ou encore, si les intérêts dont ils ont la charge le justifient, prescrire leur application ou en ordonner de nouvelles pour la durée qu’ils déterminent.

  1. Distribution des dividendes

Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire a appelé, le 24 mars dernier , les entreprises à « la plus grande modération » dans le versement de dividendes en 2020. Le 27 mars 2020, il a ensuite annoncé un encadrement à venir en précisant notamment que « si les entreprises ont besoin de trésorerie et qu’elles demandent l’aide de l’Etat, elles ne peuvent pas, elles ne doivent pas verser de dividendes, et nous veillerons à ce que ce soit respecté ». Lundi 30 mars, Monsieur le Ministre a apporté quelques précisions : « J’invite toutes les sociétés qui ont accès au chômage partiel, c’est à dire qui ont leurs salariés payés par l’État, à faire preuve de la plus grande modération en matière de versement de dividendes. Et j’irai plus loin. Soyez exemplaires : si vous utilisez le chômage partiel, ne versez pas de dividendes ». Il n’est cependant pas encore certain qu’un texte à la portée générale vienne réglementer la question.

Pour l’heure, certains grands groupes ont déjà annoncé ne pas verser de dividendes cette année. D’autres ont réduit le montant de leurs dividendes tandis que certains ont renoncé à l’aide de l’Etat pour maintenir une distribution des dividendes.

En effet, un document publié sur le portail du Ministère de l’Economie et des finances a précisé les engagements à prendre par les grandes entreprises qui ont bénéficié, à partir du 27 mars 2020, de mesures de soutien en trésorerie notamment si elles ont demandé un report d’échéances fiscales et sociales ou un prêt garanti par l’État.

Les entreprises concernées sont les entreprises indépendantes ou les groupes qui employaient, au titre du dernier exercice clos, au moins 5 000 salariés ou avaient un chiffre d’affaires consolidé supérieur à 1,5 milliard d’euros en France. Pour bénéficier du soutien étatique, elles doivent s’engager à ne pas verser de dividendes en 2020 et à ne pas racheter d’actions au cours de cette même année. En cas d’irrespect de cet engagement, les cotisations sociales ou échéances fiscales reportées ou le prêt garanti par l’Etat devront être remboursés avec application des pénalités de retard de droit commun.

En tout état de cause, avant toute distribution, il demeure nécessaire d’anticiper les conséquences financières futures de la crise sanitaire et, pour certaines sociétés, de prendre en considération leur image aux yeux des tiers et essentiellement des consommateurs.

[1] Sous réserve de l’avis favorable de la Commission Européenne – Cf. la réserve formulée plus haut

[2]Sauf l’exception suivante : « pour les personnes physiques ayant bénéficié d’un congé pour maladie, accident du travail ou maternité durant la période comprise entre le 1er mars 2019 et le 31 mars 2019, ou pour les personnes morales dont le dirigeant a bénéficié d’un tel congé pendant cette période, par rapport au chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre le 1er avril 2019 et le 29 février 2020 ».