Lutte contre la fraude fiscale : les premières mesures dévoilées

Lutte contre la fraude fiscale

22 mai 2023

Un communiqué de presse publié le 9 mai par le cabinet du ministre des Comptes publics, Gabriel Attal, dévoile diverses mesures constituant le premier volet du plan de lutte contre la fraude fiscale.
Deux principaux objectifs sont affichés par le Gouvernement. D’une part, l’augmentation significative des contrôles avant la fin du quinquennat, et d’autre part, le renforcement des obligations et sanctions des contribuables en matière de fraude fiscale.

 

Le renforcement du contrôle des particuliers aux patrimoines les plus importants et des grands groupes d’entreprises

Le Gouvernement ambitionne d’augmenter de 25% les contrôles fiscaux des particuliers dotés des patrimoines les plus importants avec un recours accru au data mining, permettant à l’administration fiscale d’analyser à grande échelle les données de masse dont elle dispose afin de programmer des contrôles fiscaux.

S’agissant des entreprises, l’attention devrait se focaliser sur les plus grands groupes.

Les contrôles douaniers devraient également s’intensifier, en priorité dans le domaine du e-commerce.

Cet objectif s’accompagne d’un accroissement des moyens de l’administration fiscale, avec notamment, une augmentation importante des effectifs du contrôle fiscal et de la police fiscale.

De plus, le Gouvernement annonce la création d’une cellule de renseignement fiscal, hébergée au sein de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED).

Cette cellule serait autorisée à mettre en œuvre les techniques de renseignement au profit de la recherche des fraudes fiscales les plus complexes et graves. Sont particulièrement visées, l’optimisation dite « abusive » des grandes multinationales, le recours à des cabinets de défiscalisation, la dissimulation d’avoirs dans des paradis fiscaux ou des « entités opaques », au titre desquelles le ministre cite expressément les trusts.

Enfin, le Gouvernement souhaite mettre en place des mesures contre les sociétés-éphémères, définies par le Gouvernent comme « celles qui disparaissent avec le produit de leur fraude ».

En particulier, le délai d’opposition des créanciers des opérations de transmission universelle de patrimoine (TUP) serait porté à 60 jours afin d’assurer l’information des services de l’Etat et ainsi empêcher le détournement de ces opérations.

De même, le recours à la liquidation amiable des sociétés serait conditionné à l’absence de dettes fiscales ou sociales.

 

Le renforcement des obligations et sanctions des contribuables en matière de fraude fiscale

Cet objectif devrait être accompagné d’une réforme qui figurera au projet de loi de finances pour 2024.

Cette réforme porterait en particulier sur le contrôle des prix de transfert, lequel serait facilité par deux moyens : l’allongement du délai de reprise de l’administration et l’extension des obligations documentaires des entreprises.

En effet, afin de permettre à l’administration de contrôler les prix de transfert sur les actifs incorporels, le délai de reprise serait allongé concernant ces opérations.

Par ailleurs, le projet de loi devrait prévoir l’abaissement du seuil d’assujettissement à l’obligation d’établir une documentation complète des prix de transfert.

Actuellement, les groupes d’entreprises sont soumis à cette obligation à partir de 400 millions d’euros de chiffre d’affaires ou d’actif brut, conformément aux dispositions de l’article L.13 AA du livre des procédures fiscales.

Cette documentation serait désormais opposable au contribuable.

En contrepartie du durcissement des obligations déclaratives des entreprises, le gouvernement prévoit d’accélérer le traitement des demandes d’accord préalable en matière de prix de transfert.

Enfin, du côté des sanctions, le Gouvernement proposera dans son projet de loi la création d’une sanction « d’indignité fiscale » qui aurait vocation à priver de leurs droits à crédits ou réductions d’impôt des personnes condamnées pour manquements gaves à leurs obligations fiscales. Les modalités d’une telle sanction sont encore à l’étude.

D’autres mesures répressives sont annoncées par le ministre des Comptes publics, comme la création d’un délit d’incitation à la fraude fiscale, destiné à poursuivre la proposition et la mise en ligne sur internet ou les réseaux sociaux de « kits de fraude » ou la création d’une peine complémentaire de travaux d’intérêt général (TIG) à l’encontre des personnes reconnues coupables de fraude fiscale, même sans peine de prison.

Parallèlement à l’intensification de la répression, le Gouvernement prévoit de renforcer le droit à l’erreur du contribuable. Le communiqué évoque ainsi une généralisation des propositions de régularisation des anomalies de faible enjeu détectées par l’administration fiscale, ainsi que la création d’intérêts moratoires à la charge de l’administration lorsque celle-ci commet une erreur.

Les détails de cette réforme devraient être connus lors de la présentation officielle du plan global de lutte contre les fraudes fiscales.

 

Par Marie Verrier