Dans le cadre d’une mise à jour de sa doctrine le 15 décembre 2022, l’Administration fiscale a rapporté à compter du 1er janvier 2023 la réponse ministérielle du 16 septembre 1996 reprise au BOFIP-Impôt BOI-RSA-GER-10-30-2012-09-12, n°510 qui permettait l’imposition dans la catégorie des traitements et salaires des associés de SEL exerçant leur activité au sein de la société au titre de leur fonction technique.
Rappel des principes existants
En l’absence de dispositions fiscales spécifiques, le sort des associés de sociétés d’exercice libéral (« SEL ») exerçant leur activité au sein de la société est en principe réglé par les règles de droit commun.
Ainsi :
- Conformément à l’article 92 du CGI, les professions exercées sous une forme libérale sont imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (« BNC ») ;
- Les rémunérations, quelle que soit leur dénomination, versées en contrepartie de l’exercice d’une activité salariée, entrent dans la catégorie des traitements et salaires définie à l’article 79 du CGI.
Le Conseil d’Etat a en effet, dans une décision du 8 décembre 2017 n°409429, confirmé que les rémunérations versées au titre de l’activité professionnelle à un associé professionnel interne (« API ») d’une SEL dans des conditions ne traduisant pas l’existence d’un lien de subordination à l’égard de la société ont la nature de BNC et sont assujetties à l’impôt sur le revenu dans cette catégorie. Le conseil d’Etat rappelle que la rémunération des fonctions techniques est distincte de la rémunération du mandat social, cette dernière étant imposable, par application de la loi, dans la catégorie des traitements et salaires.
Néanmoins de longue date, l’Administration avait indiqué, dans une réponse ministérielle Cousin du 16 septembre 1996 (question n° 39397), qui avait été reprise au BOFIP sous la référence BOI-RSA-GER-10-30 n°590, que « pour les SEL qui sont des sociétés de capitaux, notamment celles qui ont choisi la forme juridique de SARL, seuls les gérants majoritaires ou membres de collège de gérance majoritaire de ces sociétés entrent dans le champ d’application de l’article 62 précité. Les rémunérations des autres associés d’une SELARL qui exercent leur activité au sein de ladite société et qui n’ont pas de ce fait de clientèle personnelle relèvent normalement du régime des traitements et salaires ».
Cette doctrine, en ce qu’elle exprimait une position contraire à l’application stricte des textes, présentait la nature d’une tolérance administrative. Elle permettait néanmoins aux associés qui s’en prévalait de justifier de l’imposition de leur rémunération dans la catégorie des traitements et salaires.
Remise en cause de la réponse ministérielle Cousin
Dans sa mise à jour du 15 décembre 2022 (BOI-BNC-DECLA-10-10-2022-05-11, n°110), l’Administration fiscale a :
- rappelé en se fondant sur la décision précitée du Conseil d’Etat que les rémunérations perçues au titre de l’exercice d’une activité libérale par un associé d’une SEL sont imposables par principe dans la catégorie des BNC (sauf en cas de lien de subordination) ;
- indiqué que les précisions doctrinale prévoyant l’imposition des rémunérations perçues par les associés d’une SEL au titre de cette activité dans la catégorie des traitements et salaires ou selon les dispositions de l’article 62 du CGI n’étaient plus applicables à compter dans revenus de l’année 2023 ;
- admis que jusqu’à l’imposition des revenus de l’année 2022, les associés de SEL peuvent se prévaloir de la position doctrinale antérieure pour justifier l’imposition des rémunérations qu’ils perçoivent à raison de l’exercice de leur activité libérale dans ces sociétés dans la catégorie des traitements et salaires ou, pour ce qui concerne les gérants majoritaires de SELARL et les associés gérants de SELCA, dans les conditions prévues à l’article 62 du CGI.
Il conviendra de tirer l’ensemble des conséquences induites de cette remise en cause qui vont porter tant sur le fonctionnement de la SEL qui n’aura plus effectuer de retenue à la source d’impôt sur le revenus que sur le régime d’imposition, la couverture sociale complémentaire et les obligations déclaratives des associés. Il sera peut être également utile d’étudier la possibilité et l’opportunité pour les associés concernés d’exercer l’option à l’impôt sur les sociétés selon la possibilité ouverte par l’article 13 de la loi 2021-1900 du 30 décembre 2021.
Par Aurélie Carrara